Air France et l'Iran, levée de voile sur un malaise identitaire profond
La polémique autour du port du voile imposé par Air France à ses hôtesses en arrivant à Téhéran a enflammé les médias et la classe politique française, conduisant la compagnie à trancher en faveur des "frondeuses", afin d'étouffer le scandale sous-jacent.
Ainsi, les hôtesses qui le souhaitent pourront refuser d’effectuer les liaisons Paris-Téhéran, dont la reprise est prévue le 17 avril, sans faire l'objet de sanctions.
Cette décision, applaudie comme une victoire en faveur du droit des femmes a néanmoins de quoi interpeller, en raison de son caractère transgressif et des questions qu'elle soulève.
En effet, d’un point de vue strictement juridique, il semble normal que le personnel de bord, tout comme les touristes se plient aux lois du pays dans lequel ils se rendent,quand bien même celles-ci sont aux antipodes de la culture française et contraire à ses normes.
D’autant que cette loi était respectée par les hôtesses jusqu’en 2008, année à laquelle les vols entre les deux capitales ont cessé en raison des sanctions internationales imposées à la République islamique et levées après l'accord conclu à Vienne en juillet dernier.
Néanmoins, le contexte actuel brûlant et l'éternel débat autour de l’Islam en France transforment ces questions en bombes médiatiques, prêtes à exploser à la figure de celui qui s'en emparerait ou pire les ignorerait.
Elles sont d'ailleurs devenues de véritables tests électoraux pour les politiques, avides de soutiens à seulement un an des élections présidentielles et qui s'empressent de donner leur avis tous azimuts dès qu'un début de polémique lié à l'Islam émerge.
Le premier en tête sur les questions identitaires étant le Front national, dont le numéro 2 a immédiatement réagi sur Twitter : "Air France ne sera jamais Air Burka : soutien aux hôtesses", ou Jean-Luc Mélenchon : "Elles (les hôtesses) n'ont pas à le faire, elles sont citoyennes françaises, les Français sont libres et appartiennent un Etat laïc".
Le manque de pertinence de ces réactions au regard des faits traduit la vacuité du débat au sein duquel les amalgames et les caricatures se multiplient. Comme si le fait de porter un voile entre l'avion et l'hôtel remettait en cause la laïcité de l'Etat français ou la politique d'Air France...
L'exemple de la controverse autour des marques de mode occidentales proposant des tenues islamiques est une autre manifestation de "bombe médiatique" qui a défrayé la chronique ces jours-ci, et dont il convient de se méfier à l'heure où le chômage grimpe et où le terrorisme fait rage.
M.B