Nationalité et religion: deux notions ambigües

Publié le par actu-moyenorient.over-blog.com

 

Le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas a déclaré, à Ramallah, à l'occasion de l'anniversaire du prophète Mahomet, que lorsque "l'Etat de Palestine sera créé, aucun israélien, qu'il soit musulman, chrétien ou juif, ne pourra rester sur le territoire de notre Etat". Abbas a ajouté : " nous sommes prêt à accepter le présence de tout ressortissant étranger sur notre territoire, à l'exception des Israéliens"

Source : Guysen. International. News

 

Si la plupart des analystes abordent le conflit israélo-palestinien à travers le prisme territorial ou économique et considèrent la religion comme une cause induite ; il semblerait qu’il faille appréhender la dynamique religieuse en tant que variable active intrinsèquement liée à la question de la nationalité.

 

En effet, lorsqu’Abbas fait allusion aux citoyens israéliens (toutes confessions confondues), on peut se demander si la notion de citoyenneté doit être entendue dans son acception traditionnelle ou en tant qu’appartenance à une communauté religieuse (spécifiquement dans le cas d’Israël, qui rappelons-le, est un Etat Juif).

 

A bien des égards la relation entre nationalité et religion est ambigüe surtout dans cette région proche-orientale ou les deux notions sont souvent confondues.

 Les problèmes posés par cette ambigüité sont multiples: laquelle domine l’autre ?  Les deux sont-elles conciliables ?

Autrement dit, un individu est-il d’abord citoyen ou membre d’une communauté religieuse ? Un arabe israélien est-il musulman plus qu’il est israélien ? Un juif est-il juif avant d’être israélien ?

 

Derrière  ces questions d’apparence banale se cachent pourtant des problématiques complexes qu’on peut notamment relier au débat français sur la laïcité et l’identité nationale.

Néanmoins, dans les Etats occidentaux, la question a été réglée depuis la séparation entre l’Eglise et l’Etat qui a consacré le principe de laïcité et a relégué la religion au domaine strictement privé.

 

Ce regard occidental doit toutefois être ajusté lorsqu’on aborde le monde arabe ou le Moyen-Orient en général car les Etats de cette région sont loin d’avoir consacrés ce principe de laïcité et s’appuient même sur la religion pour garantir une certaine unité au sein de la nation.

 

En d’autres termes, là ou nos dirigeants occidentaux constatent les divisions nationales causées par la religion, les autres (arabes et israéliens par exemple) s’appuient sur ses vertus unificatrices participant à l’émergence du sentiment national. D’un côté méfiance, de l’autre instrumentalisation.

 

Et c’est précisément cette méfiance occidentale à l’encontre du fait religieux qui fait que nos experts occultent ce phénomène au profit des dynamiques territoriale ou économique : on assiste alors à des débats traitant uniquement de la religion comme vecteur de l’intégrisme sans s’intéresser à son réel poids politique, social et son rôle dans la création de l’Etat.

Ces débats sont pourtant vitaux car on ne peut comprendre un seul aspect de ce conflit sans y rattacher le phénomène religieux (duquel découle notamment la notion de nationalité).

 

Après ces considérations, la déclaration de Mahmoud Abbas revêt un sens différent et permet d’étayer les problématiques évoquées.

On réalise à quel point la question d’un futur Etat palestinien ne peut être résolue sans avoir bien distingué le champ national et le champ religieux.

 

Si l'on se fie à ces propos, il semble que pour Abbas, la nationalité prime sur la religion puisqu’un musulman israélien ne pourrait bénéficier de la nationalité palestinienne : autrement dit, l’appartenance à la religion musulmane ne constituerait pas un facteur assez déterminant pour un citoyen israélien qui souhaiterait s’installer en Palestine.

 

Pour simplifier, l’Etat palestinien se définirait ainsi comme un Etat pluriconfessionnel anti-israélien alors même qu’Israël compte une communauté arabe conséquente.

 

Si l’équilibre entre nationalité et religion a joué un rôle conséquent dans la trajectoire historique de tous les Etats nations et a permis de faite triompher l’appartenance nationale dans la plupart des cas, il semble que le Proche-Orient continue d’être tiraillé entre les deux visions qui ne cessent de se combattre ou de se confondre l'une l'autre.

 

A ce titre, l’exemple des révoltes arabes du moment révèle d’ailleurs la force unificatrice du sentiment national et la tentation tout aussi forte des mouvements religieux de s’approprier ces mouvements.

On retrouve ici la dynamique religion VS nationalité.

 

 

MB

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